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POL 2023, 40 ans de littérature
03/01/2023
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Tout à la fois roman d'apprentissage, thriller, roman d'amour et poème en prose, Les Fleurs sauvages nous conduit sur le chemin dangereux que se fraye la tendresse entre une soeur artiste et un frère qui gagne sa vie par le commerce des armes. La jeune Milva âgée de 16 ans vit avec son père, ouvrier fondeur, à Saignelégier, dans le Jura suisse. Pour les vacances, elle rejoint sa mère, taxi à Mane dans les Alpes-de-Haute-Provence. Milva dessine beaucoup et tout le temps. Au musée de la Chaux-de-Fonds, elle découvre avec ravissement les dessins floraux de Marie-Louise Goering, artiste méconnue. Théo son demi-frère, de 8 ans son aîné, est un petit délinquant tombé progressivement dans le grand banditisme. Kyoko la petite amie japonaise de Théo, en fouillant l'ordinateur de son compagnon, découvre que celui-ci se livre au commerce d'armes provenant des Balkans qu'il revend à des milices libyennes. À cause d'une livraison de marchandise en échange de laquelle il ne perçoit pas la somme qui lui a été promise, et après un passage à tabac à Beaulieu-sur-Mer, Théo décide de garder trois caisses d'armes et de se cacher avec elles à Mane, dans un ancien tunnel ferroviaire. Milva voudra se porter au secours de son frère et lui rend visite clandestinement dans sa cachette, pour lui offrir ce qu'elle a de plus précieux et intime : son carnet de dessins. Tout au long du roman, on croise la présence des fleurs : une belladone tatouée sur un bras, un vallon tapissé de bruyères et de rhododendrons, des motifs Art nouveau. Et des armes : un canif, des missiles antichars, un fusil d'assaut A47 dont Célia Houdart s'attache à décrire, entre les mains d'un touareg, en plein désert libyen, le montage et le démontage patients. Tout un réseau mystérieux de correspondances se tisse, presque magiquement, entre le pire du monde contemporain et la délicatesse d'un univers intime et familial. L'univers poétique, mystérieux et floral de la jeune adolescente se confronte aux plus violentes réalités géopolitiques. Sans manichéisme ni pathos, Célia Houdart décrit deux visions de notre monde aujourd'hui, sombre et solaire, au plus près des corps et des sensations.
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53 jours est le roman auquel Georges Perec travaillait au moment de sa mort, survenue le 3 mars 1982. Le livre est publié ici intégralement, dans une édition établie par Harry Mathews et Jacques Roubaud. Il comprend, d'une part, ce que Georges Perec avait déjà rédigé et qui recouvre onze des vingt-huit chapitres prévus ; d'autre part, un abondant dossier de notes et de brouilIons laissés par l'auteur, permettant le déchiffrement du reste du livre. Il a par ailleurs été prélevé dans les notes concernant les dix-sept derniers chapitres, celles qui étaient susceptibles de permettre aux lecteurs passionnés par la narration de reconstituer sans difficulté l'ensemble de l'histoire.
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Malinka, échappée en 1942 de ' la Shoah par balles ' est morte en 2015 en Suisse d'un ' suicide assisté '. Ces deux éléments d'une vie longue m'ont été rapportés par son fils Pierre, qui est mon ami. C'est l'euthanasie qui m'a imposé Malinka, non pas la Shoah mais ce fait que plus tard, elle soit allée à Bâle avec son fils et qu'elle y est morte.
Et c'est autour de cette femme, qui a publié le récit de la guerre où elle a perdu tous les siens, que se tisse une trame aujourd'hui, où l'euthanasie est l'horizon de notre autonomie.
Par contraste, l'auteur se laisse pénétrer par d'autres livres, d'autres écritures, pour trouver un texte qui échapperait au temps. Une histoire où la poésie cherche un monde à venir en mesure de préserver son bonheur contre l'horreur d'un monde qui planifie sa disparition. -
On s'étonne parfois de ce que Bach n'ait pratiquement pas eu de disciples, qu'il n'ait pas fait école. Rien d'étonnant, celui qui a inventé la musique et le monde est forcément seul. Il peut tout transmettre, sauf cette invention qui est totale et qui est lui-même. C'est tout ou rien, solitude, misère, oubli.
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DANS LA LITTÉRATURE QUI ME PRÉCÈDE (PARTICULIÈREMENT LA POÉSIE) PEU DE GUEUNONS. C'EST LE RÈGNE DU SINGE.
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' Deux mots placés au fond d'une grotte sont aussi l'espace du langage. Je pénètre à nouveau dans cette grotte et m'enfonce dans les soubassements du langage, armé de ce paradoxe qui doit nous servir de guide. Avec cette contradiction, creuser la langue, en explorer les galeries ; ouvrir l'espace des mots pour y découvrir des cavernes insoupçonnées. '
Valère Novarina -
Nous menions, ma soeur et moi, une existence idéalement paisible - une existence qui, à bien des égards, évoquait le paradis. Notre paradis immobilier, répétait Léonie, qui s'était toujours refusée à me dire à qui appartenait l'appartement et combien de temps nous pourrions l'occuper sans en être chassés.
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Les contes : un genre de traduction de Violaine Schwartz
Jacob Grimm, Wilhelm Grimm, Violaine Schwartz
- P.o.l
- #formatpoche
- 12 Octobre 2023
- 9782818058879
Il était une fois, non, elle était une fois une nouvelle traduction de vingt-et-un contes de Grimm (d'après le texte de la dernière édition parue du vivant des frères Grimm, en 1857), précédée d'Elle était une fois, un texte contemporain, interrogeant la place de la femme dans cette littérature et dans notre mémoire collective.
Savez-vous Sorcières que vous êtes à la proue des manifs féministes ?
Savez-vous Jeunes vierges écartelées que Barbe-Bleue tremble de peur à l'orée de son procès ?
Savez-vous Grenouilles que vous êtes une espèce en voie de disparition ?
Savez-vous Vastes forêts profondes que vous brûlez de la Bretagne à l'Australie ?
Savez-vous Dragons que vous êtes devenus figurines en plastique made in China ?
Savez-vous Princesses que vous pouvez devenir Princes et inversement ? -
Le héros de ce roman, Lars Hertervig (1830-1902), est aujourd'hui considéré comme un des plus grands noms de la peinture nordique. Très tôt, dès ses études à Düsseldorf, il fut victime de troubles nerveux. Après un séjour en asile, brisé, il vécut jusqu'à sa mort de charité publique.
Comme s'il tentait de capter cette lumière qui illumine les toiles du peintre, avec une grande économie de moyens, une sorte de minimalisme emporté, Jon Fosse fait revivre le martyre d'Hertervig en deux monologues intérieurs où une écriture enveloppante, répétitive, rythmée, développe jusqu'à l'angoisse l'obsession amoureuse et la tresse cruellement à la volonté créatrice.
Prix Nobel de Littérature 2023 -
Le héros de ce roman, Lars Hertervig (1830-1902), est aujourd'hui considéré comme un des plus grands noms de la peinture nordique. Très tôt, dès ses études à Düsseldorf, il fut victime de troubles nerveux. Après un séjour en asile, brisé, il vécut jusqu'à sa mort de charité publique.
Comme s'il tentait de capter cette lumière qui illumine les toiles du peintre, avec une grande économie de moyens, une sorte de minimalisme emporté, Jon Fosse fait revivre le martyre d'Hertervig en deux monologues intérieurs où une écriture enveloppante, répétitive, rythmée, développe jusqu'à l'angoisse l'obsession amoureuse et la tresse cruellement à la volonté créatrice.
Prix Nobel de Littérature 2023 -
Tout va bien se passer !
D'autant plus que cela se passe à Paris, non dans les rues obscures de quartiers périphériques mais en plein centre ! Quel bonheur de retrouver notre capitale, de fières avenues en fiers boulevards - et bâtiments officiels ! Car l'essentiel a lieu rien moins qu'à l'Élysée. Vous vous y dirigerez de salons en salons (voluptueusement décrits) sans jamais vous y perdre et en allant droit au but grâce à vos guides : la narratrice et... un sémillant ministre.
Mais nous ne serons pas seuls, le ministre, vous et moi. Une autre personne viendra prêter main forte, née en 1780 : Lucile Franque, peintre. C'est que je n'ai trouvé personne de mieux pour me donner un coup de main dans ce livre, c'est-à-dire nous donner un coup de main dans la vie.
Que dire d'autre ? Ah oui : un brouillard agréable baigne l'ensemble. -
- Pourquoi écrivez-vous ?
- Ma foi, c'est une question difficile. Pourquoi, en effet ? Est-ce dû à ce que jadis on appelait l'inspiration et que je préférerais nommer une nécessité, une force venue du fond de moi, de tout ce que j'ai senti et vécu et que je me crois capable de ressusciter et d'étendre ?
- Pourquoi écrivez-vous ? répète la juge, écartant d'un geste agacé de la main les balivernes précédentes. J'ai tout mon temps. -
Les pauvres et les riches ont profondément changé : les premiers ont été transformés en une foule semi-clandestine ; les seconds, en roue libre, se sont mis à enfourner et recracher du fric comme un distributeur détraqué. Alors que tout autour est dans le Zola ou dans le Barbara Cartland, le milieu du tableau continue à avancer prudemment en plein ciel après avoir perdu le contact avec la planète.
Et si les classes moyennes étaient le seul véritable ennemi de la démocratie ?... -
Il y a quand même dans la rue des gens qui passent
Robert Bober
- P.o.l
- Fiction
- 5 Octobre 2023
- 9782818058923
- Alors, toujours aussi gros ?
- Et toi, toujours aussi con ?
C'est comme ça que j'ai compris qu'ils étaient copains. Le gros, derrière son comptoir, c'était le patron du bistrot-guinguette ' Chez Victor ' situé derrière la place des Fêtes au fond de l'impasse Compans. Le con était accoudé au zinc en attendant d'être servi.
Plus tard, bien plus tard, je suis retourné voir le bistrot ' Chez Victor ', je ne l'ai pas retrouvé. Tout le quartier avait été détruit. -
La jeune artiste, c'est moi.
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Michael
Bon, restons nous-mêmes, et restons ici, mais finissons-en. Il doit bien y avoir une chanson pour ça.
Fan
Une chanson de toi, Michael, mon coeur ! Il y a une chanson de toi pour toutes les situations et pour toutes les humeurs.
Michael
Je l'ai cru longtemps, mais là, j'ai beau chercher, je ne vois pas. Une chanson qui dise à la fois la tristesse d'avoir raté sa vie et la fierté d'avoir rendu les gens heureux, ça n'existe pas. -
L'une est assistante à l'école maternelle, l'autre vendeuse de tickets dans un tramway.
L'une soutient la guerre en Ukraine, l'autre s'y oppose.
Deux vies quotidiennes et deux solitudes, dans une Russie de province où tout est vrai. -
Peut-on se quitter en s'aimant ? Peut-on s'aimer en se quittant ? Alice et Aurélien forment un jeune couple qui, comme tant de couples, ne trouve pas de réponses aux questions qu'il se pose. Une séparation dramatique les entraînera devant la justice des hommes.
Mais le problème avec la justice des hommes est simple : trop souvent, elle n'est pas humaine. -
Il est quand même tard pour appeler, je me rabats sur un SMS. Je dis à Nadia que je viens d'apprendre pour Alexandre et que je suis stupéfait, c'est le mot que j'emploie, il ne convient peut-être pas très bien mais j'ai du mal à trouver une formule adaptée. S'il était mort ou s'il avait subi un accident, ça viendrait facilement. On sait comment s'adresser à l'entourage des victimes, on sait quoi dire à ceux qui vont mal, à ceux qui souffrent. Mais qu'est-ce qu'on écrit à la femme d'un assassin ?
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J'ai voulu y croire, j'ai voulu rêver que le royaume de la littérature m'accueillerait comme n'importe lequel des orphelins qui y trouvent refuge, mais même à travers l'art, on ne peut pas sortir vainqueur de l'abjection. La littérature ne m'a pas sauvée. Je ne suis pas sauvée.
Neige Sinno lit elle-même son texte, insufflant une force supplémentaire à son bouleversant récit autobiographique.
Prix Femina 2023 -
J'aurais voulu que l'on se souvienne de moi pour autre chose que ma difformité.
Si mon destin traverse le temps, c'est pourtant ce qui restera. Stop. À l'heure de trancher, une question me rend fou : qu'aurais-je fait sans elle ? -
« Après la réalisation et la parution de vous m'avez fait chercher (2021), je pensais faire une longue pause, peut-être même ne plus jamais écrire de livre. Cependant, lorsque j'ai appris la nouvelle de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, quasi instantanément, et comme irrésistiblement, j'ai commencé d'improviser flirt avec elle, il me semblait que je devais transcrire au jour le jour l'horreur que cette guerre m'inspirait, pour repousser les limites de mon écriture. »
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J'avais dix-huit ans et j'étais amoureux. Ma vie n'avait qu'un seul but : la traduire. Mais comment trouver les mots justes pour la forme de la forme de ses seins? pour le secret du secret de son sourire? pour la profondeur ineffable de son regard sombre? Je voulais la traduire comme on traduirait un poème d'une langue qu'on aime - mais qu'on ne comprend pas. Je voulais écrire sur elle - et sur elle. Je voulais décrire ses lèvres - et ses lèvres.
Je voulais, pour toujours, la tenir toute entière sur le bout de ma langue.
Malheureusement, les premiers amours, aussi éloquents soient-ils, ne sont jamais que les préludes des premières défaites. -
petite bande est dans les doigts.
petite bande est la main.
petite bande c'est les morts qui nous poussent dans la main.
la main écrit dans la bouche avec la petite mort. toutes les paroles viennent mourir dedans nos écrits. petite bande c'est les langues. petites langues qui nous poussent dans l'écrit.